L’écrivain Frédéric Couderc est venu à la rencontre d’élèves du lycée professionnel Charles Baudelaire et du centre le Brasset au sein de la médiathèque Chenonceau le mardi 19 novembre 2024.
Il a été accueilli par Kévyn Brugeail, directeur de la Médiathèque Chenonceau et directeur adjoint des Médiathèques de Meaux, et par Sébastien Lucarelli, enseignant en lettres-histoire et référent culture du lycée Baudelaire.
Frédéric Couderc a animé une « leçon de littérature » ; c’est un dispositif mis en place par le Conseil Régional d’Ile-de-France et par la Maison des écrivains et de la littérature. Il a évoqué son dernier ouvrage Hors d’atteinte. Le modérateur de la rencontre, Sébastien Lucarelli, a présenté et résumé le livre aux élèves présents. Il indique que « le grand-père de Paul Breitner, Viktor, disparaît de son domicile pendant plusieurs heures. Il venait de prendre connaissance d’une lettre postée depuis New York. Le grand-père est vite retrouvé mais il sombre dans un mutisme quasi-total.
Le policier chargé d’élucider sa disparition évoque un ancien voisin de son grand-père nommé Horst Schumann dans le quartier de Blankenese. Après quelques recherches, Paul apprend que ce dernier était un ancien nazi, responsable du programme Aktion T4 et qui avait dirigé le centre d’extermination de Pirna-Sonnenstein.
20 000 malades mentaux y ont été exécutés.
Paul a perdu son père très jeune. Son grand-père est la seule famille qu’il lui reste. Jusqu’à cette fugue, son grand-père était pour lui un homme lambda, sans histoire. Avait-il été le complice du dénommé Schumman ? »
Frédéric Couderc précise aux élèves que « son roman a une portée universelle ». Les personnages de son roman « ressemblent au lecteur ». La rédaction de son livre lui a pris deux ans de sa vie ; il a travaillé en étroite collaboration avec le Mémorial de la Shoah à Paris. Horst Schumann a vraiment existé et l’écrivain apprend aux élèves « qu’il était bien pire que le sinistre Mengele ». L’auteur indique que les SS s’en prenaient « à ceux qui étaient différents ». L’auteur mêle littérature et histoire. Il évoque des affiches qui désignaient les handicapés « comme une charge pour la société ». L’auteur évoque la teneur de la conférence de Wannsee en janvier 1942. Les nazis voulaient exterminer 12 millions de Juifs en Europe. Horst Schumann, au sein du bloc 10 à Auschwitz, va stériliser des jeunes femmes aux rayons X et procéder à la castration des hommes tombés entre ses mains. Il va [à la suite de multiples pérégrinations] se réfugier au Ghana et sera protégé par le Président du pays Nkrumah après la Seconde Guerre mondiale. Le petit-fils de Victor, qui est écrivain, précise l’enseignant, « va se mettre à rédiger un nouveau livre Le bateau de Thésée afin de reconstituer l’histoire de son grand-père. Ce dernier avait une sœur prénommée Vera, morte très jeune. Cette douleur d’avoir perdu une sœur tant aimée va le mettre sur les traces de l’une des incarnations du mal. Le roman alterne les chapitres du point de vue de Paul à la fin des années 2010 et du point de vue de Viktor, de l’avant Seconde Guerre Mondiale à la traque de Schummann au Ghana jusqu’à nos jours. ». Sébastien Lucarelli poursuit et s’adresse à Frédéric Couderc : vous « prenez également dans le livre le lecteur par la main. Non, un écrivain n’est pas touché par la grâce un beau matin et relate une histoire dictée par une inspiration débordante qui le submerge. Il convient de réunir des sources, enquêter, se faire détective, rentrer dans les pensées de ses personnages ». Frédéric Couderc tient à faire savoir aux élèves que « 8000 anciens nazis touchaient une retraite de l’Etat allemand jusque dans les années 1980 ». Dans le contexte de la guerre froide, de nombreux anciens nazis n’avaient jamais été jugés et vivaient en toute impunité. Frédéric Couderc indique que « le personnage de Viktor va se substituer à la justice et va consacrer sa vie à venger sa sœur ». Les élèves sont très attentifs : l’auteur leur demande si « la vengeance doit se substituer à la justice », y compris si cette dernière est défaillante. Frédéric Couderc indique aux lycéens que la « littérature est là pour se saisir des grands sujets ». Dans une société dans laquelle on ne hiérarchise plus l’information, l’écrivain permet à travers un ouvrage « de donner aux lecteurs matière à réflexion ». A l’issue de sa conférence, Frédéric Couderc est chaleureusement applaudi. Un élève de seconde l’interpelle en lui indiquant qu’il souhaite acquérir son ouvrage au plus vite ! L’auteur conclut en citant Victor Hugo « si vous lisez un livre, vous n’êtes jamais seuls ».
Article rédigé par Sébastien Lucarelli, professeur de lettres/histoire et référent culture du lycée Charles Baudelaire