Le 27 août 2024, lors des vacances scolaires, une élève de première bac professionnel du lycée Baudelaire était présente lors de cette cérémonie patriotique : Abigaële Becker. Le maire de Meaux était présent en la personne de Jean-François Copé, ainsi que le Président du Conseil Départemental de Seine-et-Marne, Jean-François Parigi. Hamida Rezeg représentait la Présidente du conseil régional, Valérie Pécresse. De nombreux dirigeants des associations patriotiques assistaient à cette manifestation : on peut citer notamment Jean Bernini, Président de la Société des Membres de la Légion d’Honneur de Meaux. Les représentants des principaux cultes assistaient également à cette cérémonie.
Le chef du protocole a cédé la parole à Abigaële Becker qui a lu le texte suivant en hommage à François de Tessan :
Membre du parti radical-socialiste, François de Tessan est élu député de Seine-et-Marne, avant de rejoindre le gouvernement au sein duquel il occupe à plusieurs reprises des fonctions de sous-secrétaire d’État entre 1932 et 1938. Il occupe également le fauteuil de Président du Conseil général de Seine-et-Marne d’octobre 1937 jusqu’à la dissolution des assemblées départementales par le gouvernement de Vichy.
François de Tessan crée à Meaux en 1936 un nouveau journal, Le Peuple de la Brie, dans lequel il publie de nombreux éditos ainsi que des chroniques consacrées aux relations internationales.
En 1938, il prend le contre-pied de l’opinion dominante en qualifiant les accords de Munich de « suicide démocratique », s’opposant ouvertement au nouveau Président du Conseil et camarade de parti Édouard Daladier. Il est de ceux qui préféreraient une alliance temporaire avec l’URSS communiste, afin de combattre les pays fascistes (Allemagne nazie et Italie).
Lorsqu’éclate le second conflit mondial, il ne tarde pas à encourager différents mouvements de Résistance, s’appuyant notamment sur ses réseaux diplomatiques, se réfugiant un temps dans la clandestinité.
En mars 1940, le sous-secrétaire d’Etat américain, Sumner Welles, entreprend une tournée diplomatique à la demande du Président américain Roosevelt. Il souhaite éviter le pire. Après Rome et Berlin, il se rend à Paris. A cette occasion, François de Tessan publie un éditorial dans Le journal de la Brie dans l’édition en date du vendredi 15 mars 1940. Il cite un article mentionnant cette visite de Dorothy Tompson dans le New-York Herald Tribune : « Les peuples démocratiques, dit-elle, ne se battent pas pour la géographie, pour les colonies, pour l’équilibre de la puissance impériale.
Ils ne se battent pas pour empêcher l’Allemagne d’être forte. Ils se battent pour empêcher la contagion de quelque chose qui menace non seulement leur existence en tant que nations, mais aussi leur existence en tant qu’êtres humains. Ils se battent pour les droits de l’humanité. Leur ennemi, c’est la puissance brutale, nue et criminelle de l’Etat en démence, qui s’intitule faussement un gouvernement. »
François de Tessan rappelle dans ce même éditorial que « La théorie de l’espace vital telle qu’elle est formulée par Hitler ne tend à rien de moins qu’à l’écrasement des petits peuples et à la domestication complète de l’Europe. »
Il conclut son article en indiquant « qu’il n’y a que des avantages à projeter ainsi de la lumière sur nos projets et sur nos actes. Nous n’avons rien à cacher, pas plus aux Etats-Unis qu’au reste de l’univers, sur notre combat, qui est un grandiose combat pour la Libération des peuples. »
Nous songeons à cet instant au film Le discours d’un Roi qui présente les circonstances de l’accession au trône de Georges VI qui a su surmonter son bégaiement lors de l’annonce de l’entrée en guerre de son pays contre l’Allemagne nazie en 1939 à la radio. Le Roi indique à ses compatriotes que, « pour la deuxième fois, dans l’existence de la plupart d’entre nous, nous sommes en guerre. A maintes et maintes reprises, cette année, nous avons tenté de trouver une issue pacifique aux différends nous opposant à ceux qui sont aujourd’hui nos ennemis. Mais nos efforts sont restés vains.
Nous voici plongés de force dans ce conflit, car nous sommes tenus de nous dresser contre un principe, qui, s’il devait s’imposer, serait fatal à tout ordre civilisé dans le monde. Un tel principe dépouillé de ses artifices, est sûrement l’expression de cette doctrine primitive qui veut que la force prime sur le droit. Au nom de tout ce que nous chérissons, il est inconcevable que nous refusions de relever ce défi. »
François de Tessan est arrêté sur dénonciation à Evaux-les-Bains (Creuse) en novembre 1942, avant d’être transféré le 12 janvier 1943 au camp de Compiègne-Royallieu puis en Allemagne, au camp de Buchenwald. François de Tessan meurt de maladie et d’épuisement en avril 1944.
Un hommage lui est rendu dans l’édition du Peuple de la Brie dans son édition du vendredi 8 décembre 1944 : « 7 JUIN 1940 – 8 DÉCEMBRE 1944
Deux dates !… Séparées par la durée de l’occupation ennemie.
Dans cet intervalle, Le Peuple de la Brie a interrompu sa publication, ne voulant pas, malgré les invitations qui lui étaient signifiées, servir d’instrument à la propagande allemande.
Fidèles à notre indéfectible doctrine de loyauté patriotique, nous avons refusé de nous plier aux exigences de l’ennemi extérieur ou intérieur, qu’il soit de Berlin ou de Vichy.
Enfin libérés avec l’aide de nos alliés, grâce à l’héroïsme de courageux Français qui, pendant plus de quatre ans, sous la magnifique impulsion du Général de Gaulle, n’ont jamais voulu accepter l’idée de la défaite, nous reprenons notre publication.
Une ombre à notre joie !
Celle qui nous prive aujourd’hui de la présence de notre affectionné Directeur politique, François de Tessan.
Lui aussi n’a jamais voulu s’incliner. Il avait tenu à rester au milieu de sa circonscription, tenant à être prêt à apporter à tous le réconfort moral dont certains pouvaient, à juste titre, avoir besoin. Et restant sourd aux conseils de prudence qui lui étaient prodigués. […] Pour nous, nous avons pour devoir de suivre la voie qu’il avait si bien tracée.
Nous ne saurions oublier que la guerre n’est pas terminée et que nous devons, chacun dans toute la plénitude de ses moyens, aider le Gouvernement provisoire de la République à mener à bien la lutte qu’il a engagée pour le redressement du Pays et la reconquête de son prestige. »
Vive la République et vive la France.
Cette jeune lycéenne a été longuement applaudie et congratulée par Jean-François Copé ainsi que par le nombreux public présent devant le monument aux morts de Meaux en ce mardi 27 août 2024.
Article rédigé par Sébastien Lucarelli, Professeur de lettres-histoire et référent culture du lycée Charles Baudelaire de Meaux